L’Homme qui tombe – Don DeLillo

A la rencontre du livre…

l_homme_qui_tombeTitre : L’Homme qui tombe

Titre original : Falling man ; traduit de l’américain par Marianne Véron

Auteur : Don DeLillo

Editions : Actes Sud

Edition originale : Scribner, New York

Genre : Roman

Publication : 2007 (2008 pour la traduction française)


L’histoire…

En cette matinée du 11 septembre 2001, il y a, dans la main de Keith, masqué de cendres, criblé d’éclats de verre et revenu d’entre les morts dans l’appartement de son ex-femme, Lianne, une mallette qui ne lui appartient pas et que sa main de rescapé serre, mécaniquement, de toutes ses forces. Tandis que Keith se rapproche et s’éloigne d’une autre femme rencontrée dans l’enfer des tours, avant de décider de finir sa vie assis devant une table de jeu dans le désert de Las Vegas, Lianne dérive entre l’inquiétude que lui causent l’attitude farouche et réticente de son propre fils, l’atelier d’écriture pour malades d’Alzheimer dont elle a la charge, l’Homme qui Tombe, ce performeur que la police traque, la santé de sa mère qui vit depuis des années une incompréhensible liaison avec un mystérieux Européen, marchand d’art toujours entre deux avions, entre deux univers…


Un roman vertigineux au cœur de l’enfer

Dans le cadre de mon cours de « Littérature et société », je dois préparer un exposé sur le thème « Littérature et attentats ». Une amie m’a alors conseillé L’Homme qui tombe de Don DeLillo. Ce roman surprenant revient sur les attentats du 11 septembre, de toute évidence les premiers à autant marquer la population, américaine bien sûr, mais aussi mondiale.

« Ce n’était plus une rue mais un monde, un espace-temps de pluie de cendres et de presque nuit. »

                Dès le premier chapitre, la première phrase, on est frappé de plein fouet par la violence de cette matinée du 11 septembre 2001. Une violence chaotique qui donne le ton du reste du roman. L’atmosphère des 300 pages restantes est marquée par les bruits, les odeurs et les images des deux tours qui s’effondrent. Et nous, lecteurs, nous sommes les spectateurs stupéfaits de ces événements insensés. Le récit de ces derniers reviendra d’ailleurs souvent dans le roman, comme une ritournelle, signe que rien ne sera jamais plus pareil.

                Assez vite, on en vient tout de même à émettre l’hypothèse que le 11 septembre est une sorte de nouveau départ pour les protagonistes. En effet, ils semblent vouloir reprendre le cours de leur vie et tentent de se reconstruire et d’avancer. On suit alors leur laborieux chemin pour surmonter le traumatisme qu’ils ont subi quand les avions ont percuté les tours jumelles. On partage ainsi avec eux leur dépérissement face à la tragédie d’un monde qui vole en éclats et leurs tentatives désespérées pour réintégrer une routine. Et quelque part, on a l’impression qu’une nouvelle forme de vie, en quelque sorte, peut venir après le chaos : Keith fait de nouvelles rencontres tandis que Lianne commence à voir le monde différemment.

                La troisième partie du roman fait un bon de trois ans en avant. On s’attendrait ainsi à un récit un peu plus lumineux, plus tourné vers l’avenir, signe que le traumatisme serait surmonté, ou au moins en bonne voie de l’être. Mais si les protagonistes semblent persister à essayer de continuer leur vie, leurs tentatives sont vaines et ils errent sans but. Le souvenir du 11 septembre continue de les hanter et ils ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes. Et comme une dernière preuve qu’on ne peut pas renaître après les attentats, l’ultime chapitre du roman nous fait une dernière fois le récit des événements tragiques de cette matinée de septembre.

                On est également frappé de plein fouet par la plume de Don DeLillo. Son écriture blanche nous montre sans filtre une violence dont nous n’aurions jamais pu imaginer l’ampleur. L’atmosphère lourde et fantomatique du livre ainsi que le style impersonnel et froid de l’auteur nous mettent rapidement mal à l’aise et nous serrent la gorge pendant 300 pages. D’autant plus que ce style, où l’auteur ne s’engage pas, nous force à rester des spectateurs impuissants des événements. L’impersonnalité concerne également les protagonistes, spectres qui errent sans but. Mais parce qu’ils n’ont pas de caractère propre, d’une certaine manière, on est eux aussi.

                L’Homme qui tombe s’apparente donc à une catharsis : écrire pour mettre des mots sur les événements et tenter de surmonter le traumatisme. Mais avec ce roman, l’auteur se lance également en quête de la vérité grâce à la fiction. Certains chapitres délaissent Keith et Lianne pour s’intéresser à Hammad, le terroriste qui a lancé son avion sur l’une des tours. Don DeLillo cherche ainsi des réponses en sondant l’esprit des terroristes, leurs convictions et leurs motivations.

                L’Homme qui tombe de Don DeLillo est un roman vertigineux qui nous plonge au cœur du cauchemar des attentats du 11 septembre. Véritable catharsis, il nous fait vivre cet enfer pour mieux le comprendre – et mieux le surmonter ?

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