Félix et la source invisible – Éric-Emmanuel Schmitt

À la rencontre du livre…

Titre : Félix et la source invisible9782226440013_1_75

Auteur : Éric-Emmanuel Schmitt

Éditions : Albin Michel

Genre : Roman

Publication : janvier 2019


L’histoire…

Félix, 12 ans, est désespéré. Sa mère, la merveilleuse Fatou, qui tient à Belleville un petit bistrot chaleureux et coloré, est tombée dans une dépression sans remède. Elle qui incarnait le bonheur n’est plus qu’une ombre. Où est passée son âme vagabonde ? Se cache-t-elle en Afrique, près de son village natal ? Pour la sauver, Félix entreprend un voyage qui le conduira aux sources invisibles du monde.

Dans l’esprit de Oscar et la dame rose et de Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran, Eric-Emmanuel Schmitt interroge les mystères de l’animisme, la puissance des croyances et des rites issus d’une pensée spirituelle profondément poétique. Il offre aussi le chant d’amour d’un garçon pour sa mère.


Un voyage vers l’émerveillement

                Alors que le précédent (Madame Pylinska et le secret de Chopin) m’avait moyennement conquise, j’ai retrouvé avec Félix et la source invisible le Éric-Emmanuel Schmitt que j’admire tant ! S’inscrivant dans le Cycle de l’Invisible, ce nouveau roman explore les mystères de l’animisme avec délicatesse et nous montre comment nous mettre du baume au cœur dans les moments difficiles.

                Comme dans la plupart des romans de ce Cycle, Éric-Emmanuel Schmitt met ici en scène un quotidien qui bascule, le saisit à ce moment précis. Alors que tout va bien pour eux, une série d’incidents font de fil en aiguille tomber Fatou dans la dépression sous les yeux impuissants de son jeune fils, Félix. Derrière l’humour cocasse des apparences, le roman décrit la pénible réalité de la maladie. Il dresse un portrait plus que glaçant de la dépression qui, personnellement, m’a mise très mal à l’aise. En effet, cette dernière a parfois été légèrement exagérée : Fatou ne dit plus un mot, semble détachée de tout et s’enlise dans l’absurdité. Et pourtant, ce portrait un peu caricatural témoigne de la triste réalité de cette maladie encore assez méconnue : l’asthénie, la confusion et le fait d’agir sans pouvoir donner de sens à nos actes sont des symptômes fréquents et des plus pénibles. Avec ce roman, Éric-Emmanuel Schmitt nous amène à voir la vérité en face.

                Heureusement pour le lecteur, il y a toujours une irrésistible touche comique pour venir alléger cette atmosphère facilement pesante. Malgré le tragique des circonstances, le roman fourmille de situations rocambolesques d’une drôlerie sans bornes, portées par une fresque de personnages excentriques. Félix et la source invisible fait preuve d’un humour explosif bienvenu qui rend notre lecture d’autant plus agréable.

                Tout ce petit monde qui s’étiole est vu et raconté pat Félix, douze ans. Toute la misère qui s’abat soudain sur ses épaules nous déchire le cœur. Pourtant, il garde sa bonté et sa bonne humeur. Son dévouement et son amour pour sa mère réchauffent le cœur, et l’espoir qu’il ne perd jamais nous enseigne en toute humilité une belle leçon. Malgré sa grande maturité, Félix n’en reste pas moins un enfant dont il conserve la candeur. Alors, il rappelle deux héros d’autres romans d’Éric-Emmanuel Schmitt (également dans le Cycle de l’Invisible), qui m’avaient beaucoup marquée à l’époque : Oscar d’Oscar et la dame rose, et Joseph de L’Enfant de Noé.

                À l’intrigue nouée autour de la dépression de Fatou s’ajoutent les secrets de famille. Alors que tout lui avait semblé limpide jusque là, Félix prend peu à peu conscience qu’il ignore tout du passé de sa mère, de sa vie avant lui. Tandis qu’il tente petit à petit de faire la lumière sur ces secrets, le roman nous enseigne le poids de notre passé sur notre présent et notre avenir. Avec cette part de mystère qui entoure la vie des personnages, Éric-Emmanuel Schmitt nous montre qu’il sait aussi comment nous faire poursuivre notre lecture.

                Félix et la source invisible vient compléter le Cycle de l’Invisible, initié par l’auteur en 1997 avec Milarepa. Cette série de romans a pour vocation de faire découvrir aux lecteurs les grandes spiritualités de notre monde. Dans ce nouveau roman, il explore les mystères de l’animisme – le fait de prêter une âme à tout ce qui nous entoure. Le « surnaturel » entre alors progressivement dans le réel. Après avoir tourné en dérision le maraboutisme des charlatans (un moment très drôle au passage), Éric-Emmanuel Schmitt s’attaque au véritable animisme. Il tente de trouver des explications aux forces qui nous dépassent parfois. Il nous rappelle aussi à quel point la place qu’on accorde aux absents, à nos souvenirs et à notre histoire peut être importante. La dimension spirituelle du roman s’avère alors particulièrement apaisant.

                Félix et la source invisible est un de ces romans qui font du bien. Éric-Emmanuel Schmitt nous plonge dans un univers à la lisière du réel et du spirituel. La découverte de l’animisme nous rappelle certaines choses essentielles, mais a surtout un grand pouvoir d’apaisement. On retrouve alors avec plaisir le grand talent de l’auteur qui concilie divertissement et philosophie.

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