Un monde sans moi – Franck Lucas

A la rencontre du livre…

Titre : Un monde sans moiun-monde

Auteur : Franck Lucas

Editions : Erick Bonnier

Genre : Roman

Année de publication : mars 2017


L’histoire…

« A moi l’image du héros lointain, du Zeus tonnant (pas trop quand même) et du deus ex machina. A elle tout ce fatras de l’angoisse et de la dépendance enfantines que l’on lance chaque jour à la tête de sa maman lorsque l’on appartient à la race étrange et monstrueuse des petits d’homme.

Pendant vingt ans, j’ai cherché à toucher du doigt l’héroïsme sur moult champs de bataille ; et je ne savais pas que l’héroïsme dormait chaque nuit à mes côtés lorsque la guerre me donnait congé. »

Au crépuscule de sa vie, un homme emprisonné dans le silence se raconte enfin. Dans sa traversée du siècle et de la guerre, sa boussole fut son amour d’enfance, Marie.

Par sa lucidité, son humour et sa mélancolie, Michel révèle, touche après touche, une histoire empreinte d’humanité, une flèche qui va droit au cœur.


« Le voile s’est déchiré »

                J’ai reçu à lire Un monde sans moi de Franck Lucas dans le cadre de la Masse critique de Babelio. Le site l’avait présenté sous un jour tel qu’il semblait intéressant, mais malheureusement pour moi, la « flèche » a manqué sa cible.

« Cette source très indirecte de la vérité, il faudra bien que je fasse comme tout le monde et que je la nomme, par commodité : ma mémoire. »

                Un monde sans moi est une exofiction, c’est-à-dire que l’auteur fonde sa fiction sur des éléments réels. Ainsi, Michel, personnage principal et seule voix narrative, brise enfin le silence et raconte sa vie, une vie directement inspirée de celle des parents de Franck Lucas, l’écrivain. Pas de chance pour moi qui n’aime pas ce genre, le récit à la première personne utilise les codes de l’autobiographie pour donner l’illusion de la réalité du témoignage. Le ton est pudique, intime, donne l’impression d’être authentique, tandis de Michel grandit et devient peu à peu un homme. L’auteur joue ainsi beaucoup sur l’aspect décousu du récit : tout revient au personnage par fragments incomplets et désordonnés. Mais cette organisation du récit m’a posé beaucoup de problèmes pour suivre le cœur de l’intrigue.

                Celle-ci se fonde sur l’histoire de Michel, un homme en tous points ordinaire, qui après des années de silence, se décide enfin à se confier sur sa vie, les guerres et le siècle qu’il a traversé, ses épreuves et ses joies… Il livre tout : les instants majeurs de son existence, son histoire, ses pensées. Très vite, le roman prend le ton de la complainte d’un homme sans attaches. Seul l’amour de sa vie, Marie, qu’il a aimée tendrement, échappe à son regard désabusé. L’atmosphère qui se dégage du roman est ainsi très sombre et mélancolique entre les guerres et l’esprit « confession de la dernière chance ». De ce fait, je l’ai trouvé assez déprimant.

« Ce n’est pas mon récit […], c’est le siècle qui fut tragique »

                En filigrane de cette fiction, c’est en fait toute une société qui se dessine sous nos yeux, un peu à la manière du film Forrest Gump. D’abord, celle de l’après-Seconde guerre mondiale, une France qui tente difficilement de se relever et de dissiper sa culpabilité. Puis la Guerre Froide, emblématisée par la guerre du Vietnam. Enfin, la France coloniale à l’agonie avec l’Algérie et l’Indochine qui prennent leur indépendance. C’est ainsi toute l’histoire de la fin chaotique du siècle dernier qui transparait dans ces pages. A un moment précis de l’histoire, le roman prend ainsi un ton intergénérationnel : Michel converse avec Madame de P., sorte de « vestige » de la fin du siècle précédent et de l’instable IIIe République. Un portrait très dense et riche, mais qui a, pour ma part, manqué d’actualisation : cette génération n’est pas la mienne, comment être véritablement touchée alors ?

                Ce qui se démarque du reste du roman, c’est surtout la prose de Franck Lucas, manifestement très travaillée. Pour autant, je ne trouve pas le style très réussi. Si sa plume transcrit bien la pudeur et l’intimité du contenu, l’auteur utilise souvent un vocabulaire et des tournures syntaxiques très recherchés. La lecture demande ainsi parfois un effort que je n’avais pas toujours envie de fournir, je voulais avant tout me détendre. Dès le résumé je trouve, on se rend compte que l’écriture en fait des tonnes, et l’auteur passe parfois pour présomptueux, ce qui, en plus d’être inexact, est vraiment dommage car cela rebute le lecteur.

                Un monde sans moi de Franck Lucas est donc un roman qui ne m’aura pas convaincue, malgré de bonnes idées, telles le portrait de la société par les yeux d’un homme ou le ton pudique de la plume. Mais ces idées pas suffisamment abouties et d’autres éléments moins réussis viennent ternir ce roman qui m’a, au final, plus ennoyée que divertie.

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